Le travail intérimaire est en train de changer de visage. Et ce visage, de plus en plus souvent, n’est plus humain.
Depuis début 2025, des agences d’intérim proposent aux entreprises non plus uniquement des salarié·es, mais aussi des agents d’intelligence artificielle. Ces derniers peuvent trier des candidatures, gérer des plannings, interagir avec les clients, envoyer des mails… Bref, occuper des fonctions entières, sans contrat, sans pause, et sans représentation syndicale.
Une “main-d’œuvre numérique” déjà opérationnelle
Chez certains leaders du secteur, la transition est engagée.
– Adecco, en partenariat avec Salesforce, a lancé une plateforme appelée Agentforce, visant à “optimiser la répartition des tâches entre humains et agents IA”.
– De son côté, Randstad déploie à grande échelle sa plateforme d’automatisation X-One, intégrant des modules d’intelligence artificielle générative dans le traitement RH.
Dans les deux cas, des fonctions jusqu’ici assurées par des intérimaires sont automatisées, et des outils numériques prennent place dans la chaîne de production du travail… sans être encadrés par une convention collective, ni déclarés dans les effectifs.
Le risque d’une substitution silencieuse
La CGT Intérim alerte : c’est tout le modèle du travail temporaire qui se transforme sans débat.
– Qui décide des missions confiées à des IA plutôt qu’à des salarié·es ?
– Quel statut ont ces “agents numériques” ?
– Quels garde-fous sont prévus pour les salarié·es remplacé·es ou déqualifié·es ?
– Et pourquoi ce virage n’est-il jamais présenté en CSE, en CPPNI, ni en GEPP de branche ?
Derrière la façade technologique, il y a un enjeu de souveraineté sociale : le droit à un travail protégé, encadré, humain.
Ce que la CGT Intérim revendique
Nous ne rejetons pas l’intelligence artificielle. Mais nous refusons qu’elle serve à démanteler l’emploi, contourner le dialogue social, ou créer une “zone grise” du travail hors droit collectif.
Nous demandons :
– Un état des lieux complet des outils IA déployés dans l’intérim ;
– L’ouverture d’un espace de régulation de branche (avec les IRP, la CPNSST, la GEPP) ;
– La garantie que l’IA ne remplace pas sans contrôle le travail humain, en particulier dans les métiers les plus précaires.
L’avenir du travail ne peut être confié à des algorithmes. Il se construit avec des femmes et des hommes. Et avec des droits.
La CGT Intérim poursuivra son travail d’enquête, de veille et d’action pour que le numérique ne rime pas avec effacement social.